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Beauté-famille-sexualité

Le but de ce blog est de parler de la beauté, de la famille et de la sexualité en prenant appui sur la communauté Guin et Mina. La communauté Guin et Mina a une culture riche de plus de 3,5 siècles mais peu connue. Aujourd'hui, cette communauté n'est visualisée qu'à travers les pratiques sexuelles peu positives d'une minorité de femmes guinnou ou Mina. Ce blog revisite l'organisation sexuelle du peuple Guin et Mina à travers le temps (approche diachronique) afin d'en tirer des inspirations susceptibles de façonner notre mode de vie contemporain. Mot clés : #Beauté, #Sexualité, #Famille, #Guin, #Mina

La vie sexuelle autrefois sur l'aire culturelle Guin/Mina

Le témoignage des aînés.

Il ressort des échanges eus avec les aînés de la tranche d’âge de 50 à 90 ans que, quel que soit leur sexe, l’entrée dans la vie  sexuelle des jeunes gens coïncidait avec l’entrée dans la vie conjugale. Il était interdit, toute rencontre avec une personne de sexe opposé pour quelques échanges que ce soit.

L’éducation des jeunes gens, à leur époque, était caractérisée par le respect, la rigueur, la peur, la soumission et la sanction (les punitions et les coups de fouets étant très fréquents). La sanction, la plus évoquée par la plupart des enquêtés, était celle où les deux mains étaient ligotées par derrière afin de les immobiliser et de leur assener des coups de fouets. Parfois, cette sanction se déroulait tôt le matin, précédée d'âpres interrogations portant sur l’acte incriminé par les parents. Cette forme de sanction faisait que tous les jeunes gens, de leur époque, étaient animés d’un sentiment de peur et de l’obligation d’obtempérer à toute injonction d’où quelle vienne au sujet des comportements extra-familiaux. Il y avait l’unicité des voix pour éduquer les enfants de la communauté dans un souci de perpétuation des valeurs morales. L’honneur de la famille devant être défendu et préservé à tout prix.

L’obligation des travaux domestiques avec des corvées était la chose la mieux partagée à leur époque. Le contrôle social se faisait au-delà des géniteurs et de la famille restreinte. À cette époque, l’éducation des enfants incombait à toute la communauté : quiconque pouvait interpeller les jeunes gens, en dehors des parents-géniteurs. Ce faisant, la régulation sociale était plus une réalité dans le processus de l’intégration de la nouvelle génération à la communauté à laquelle elle appartient (en un mot le processus de socialisation).

C’est au travers de cette éducation émaillée de diverses contraintes sociales que la plupart des personnes âgées et notables, approchés au cours de notre recherche, ont connu une vie sexuelle très contrôlée. À ce titre, pour la quasi-totalité des « enquêtés », c’était au-delà de l’âge de 20 ans qu'étaient intervenus leurs tout premiers rapports sexuels. La virginité des filles était une preuve de bonne éducation et hautement valorisée lors de l’alliance. C’était généralement au cours la première nuit de noce que cette virginité était constatée par des traces de sang à l’issue du premier rapport sexuel avec l’époux. Lorsqu’elle était avérée, cette virginité était célébrée surtout par la famille de la mariée. Puisque qu’elle témoignait de la bonne éducation reçue par la fille. C’était aussi un honneur pour cette dernière et sa famille. Et la conséquence subséquente de ce fait d'honneur était l’augmentation de la dot, en l’occurrence, un rajout des pagnes prisés, des liqueurs, etc., au contenu de la dot donnée antérieurement.

 De leur part, les hommes également étaient pour la plupart surveillés. Toute tentative d'une vie sexuelle précoce était aussi sanctionnée par des coups de fouets. Certains « enquêtés » de cette tranche d’âge sus évoquée ont montré les séquelles des coups de fouets reçus au cours de leur jeunesse tant des géniteurs que des oncles en termes de sanction. La capacité de mobiliser des ressources financières et matérielles était la condition sine qua non pour prétendre à une vie sexuelle dans son cadre formellement dévolu qu’est l’alliance. L’expression régulièrement évoquée par les aînés était celle-ci « né ô dji gnon noua, noukè yé ô la so hin ô ? » (Expression traduite par « en courtisant une fille sans capacité financière, avec quoi vas-tu l’entretenir ? »). C’était pourquoi de nombreux hommes, de cette tranche d’âge sus évoquée, totalisaient cinq voire dix années de vie professionnelle avérée avant d'émettre l'idée d'entrer en alliance. Les premiers contacts sensuels entre des jeunes gens de sexe opposé se faisaient à l’abri des regards, souvent bien à l’écart des lieux d’habitation voire dans la brousse.

L'éducation sexuelle des filles Guin d'autrefois.

Le peuple «GƐn» a fondé sa sexualité humaine sur la division bipolaire des sexes. C’est cette bipolarisation qui justifie les tâches attribuées à chaque sexe dans cette communauté. C’est au travers de ce principe bipolaire que les générations d’alors avaient bénéficié de leur socialisation.

En effet, les jeunes filles d’hier, personnes âgées aujourd’hui, notaient qu’avant la scolarisation (pour celles qui ont été à l’école), donc très jeunes, elles devaient se rendre au marché pour vendre ou pour faire des achats en termes d’initiation aux activités économiques féminines. Certaines parmi elles y allaient soit avec leurs mères génitrices, soit avec des tierces personnes de sexe féminin de l’environnement familial immédiat ou élargi. Ce qui montre qu’à leur époque le commerce était d’obédience féminine dans leur univers de vie.

Cette forme d’éducation avait pour socles des valeurs morales, des interdits (prohibitions) et des sanctions. Dans ce contexte, l’enfant ne s’opposait pas à ses parents, car la fermeté et le respect de l’autorité était strictement observés. De nombreux aînés ont utilisé à ce propos l’expression : « a min boubou gbacoudô vonvon lé » [amin boubou = respect, gbacoudo = et, vonvon=crainte/peur, = y étaient]. Tout contrevenant était doublement sanctionné. La sévérité dans l’éducation, selon les aînés, les confinait à la maison, notamment les jeunes filles, après qu’elles aient eu leurs premières menstrues et/ou après l’apparition des premiers signes de maturité sexuelle.

À cette étape de leur croissance, elles bénéficiaient des conseils en matière d’hygiène corporelle : comment se laver, laver leur couche en pagne au moment des menstrues, et faire régulièrement leurs toilettes matinales avant de saluer quiconque. C’est ce que désignent les expressions guin comme : « clo affo » ou « yi kpamé » [faire sa toilette]. L’eau de la toilette était mise dans une petite jarre couverte et très protégée contre les éléments pathogènes. Parfois, il était recommandé l’utilisation des plantes à vertu médicinale comme l’amangrin, l’atchiayo ou ésrou.

L’intérêt de l’utilisation de ces plantes, encore d'actualité, est de maintenir le sexe ferme qui garde une fraîcheur de « jeune fille » et un parfum enivrant qui accroche en permanence l’homme. En Afrique, en général, et chez les «GƐn», en particulier, ce sont souvent les grand-mères qui détiennent les connaissances endogènes sensuelles. Elles les transmettent de génération en génération par voix orale et par l’exemple. Les parents, le plus souvent, envoient leurs filles auprès des grand-mères, au cours de la période de la socialisation, pour se faire former. Certains jeunes-hommes «GƐn», mariés à des femmes d’autres ethnies, en faisaient autant. Les grand-mères prennent ce rôle très au sérieux et l’exécutent avec minutie et rigueur. Voici un extrait de l’ouvrage autobiographique de Chantal Codjo publié en février 2019 qui aborde cette question d’éducation morale et sexuelle :

« Débarquées de très jeune âge dans cette cour des grand-mères à Zomayi, nous avions eu droit à une éducation presque parfaite : l'hygiène corporelle, les travaux ménagers, l'initiation au petit commerce et à la cuisine, l'éducation morale au cœur de laquelle se trouvait le catéchisme, et que sais-je encore ? Ah j'oubliais ! Il y avait aussi l’initiation à l’art de devenir de futures femmes coquettes et séduisantes. La nuit venue, on devait forcément prendre une douche, nous poudrer le corps garni de ces jolies perles qui nous jonchaient la hanche et surtout nous coucher sans caleçon car une fille ne devait pas en porter pour se coucher, hum ! Quand j'y pense encore…, la séduction commence au bercail, chez les Mina.

Mais, ce fut une éducation beaucoup trop rigide, dominée par des hurlements et des fessées. Je me souviens encore de cette forte corpulence de notre arrière-grand-mère qui nous serrait entre ses cuisses pour nous pincer les oreilles en cas de bêtises et des autres grand-mères de la cour qui rapportaient tous nos faits et gestes afin que notre arrière-grand-mère nous punisse, etc. Admettons que c'était la norme de l’époque, mais un détail leur avait échappé : des enfants de notre âge avaient aussi besoin d'affection, de se blottir contre un adulte qui leur inspire confiance, de se faire câliner et d’entendre dire "je t’aime, ma fille ; je t’aime mon garçon", etc. C'était là, la denrée rare qui nous manquait au cours de notre enfance. » (Codjo, 2019, p.58).

Ce contrôle social, élargi et ferme, de l’époque des aînés a existé jusqu’à une période récente (et peut-être encore dans quelques rares familles aujourd’hui). L’une des aînées approchées sur le terrain disait ceci :

« Nous, les filles de notre génération, étions très soumises à nos parents. Ce qui fait de nous des filles bêtes par rapport à celles d’aujourd’hui qui qualifient notre éducation de non émancipée. Cependant, ce qu’elles ignorent, c’est que cette éducation a éveillé en nous des potentialités d’auto prise en charge et de prise d’initiatives, car il y avait des corvées en notre temps. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui parce qu’il y a maintenant ce qu’on appelle les droits de l’enfant, vulgarisés partout. C’est plutôt là le problème des jeunes filles d’aujourd’hui » (Une aînée de 76 ans, commerçante).

L’éducation sexuelle, ainsi présentée, ne visait qu’un seul objectif : préparer la fille, dès ses tendres âges, à son rôle de future épouse. En aucun cas, les parents (notamment les femmes) ne devaient faillir à ce rôle d’éducateurs. Leur honneur était ainsi mis en gage, notamment au moment de l’entrée en alliance de leur fille. L’éducation du temps de nos grand-mères jusqu’à notre époque était marquée d’une rigueur indescriptible.

« Nos parents avaient reçu une bonne éducation et nous l’avaient transmise. Mais, les enfants d’aujourd’hui ne sont plus bien éduqués. [Moi : pourquoi faites-vous une telle affirmation ?] Voyez-vous ? Hier, l’éducation était une affaire de toute la communauté. Si un enfant s’était publiquement mal comportement, quiconque l’a reconnu comme étant l’enfant de telle personne, le corrigeait instantanément et le raccompagnait jusqu’auprès de ses parents ; en faisait le rapport aux parents et en présence de ce tiers, les parents également le frappaient une seconde fois. Mais aujourd’hui, si un tiers touche à un enfant qui s’est mal comporté publiquement, cet enfant rentre chez lui et va faire appel à ses parents (la maman notamment).

Sinon autrefois, Agoué était une référence en matière d’éducation, autant pour les jeunes filles que pour les jeunes-hommes. Les fils et les filles d’Agoué, placés autrefois auprès des gens dans n’importe quel pays, étaient bien appréciés, bien jugés, surtout les jeunes-filles faisaient de très bonnes épouses […] » (Une aînée de 80 ans).

« Par le passé, quand tu te comportes mal, on te ligote et on te tape ; quand un adulte te commande quelque-chose, il crache par terre, si tu reviens après que le cracha sèche, c'est que tu as trainé, et on te tape. Aujourd'hui quand tu commandes un enfant, c'est toi même qui ira le chercher, sinon tu risques de ne pas le retrouver. Après l'indépendance tout à changer, on venait depuis Abidjan demander d'après nos filles ici, parce qu'elles sont bien éduquées, aujourd'hui, quand nos filles s'habillent, les fesses sont dehors […] » (Un aîné de 91 ans).

Un tel pouvoir éducatif de la communauté sur les enfants d’autrefois était parfois élargi jusqu’au moment de l’alliance.

La vie sexuelle autrefois sur l'aire culturelle Guin/Mina
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